Éco(Systèmes) d’espoir

Sur l’espoir et la vulnérabilité

Au printemps 2020, alors que des mesures de confinement visant à limiter la propagation du virus de la COVID-19 étaient mises en œuvre à l’échelle mondiale, des images d’animaux sauvages errant sur les routes, dans les ports et au coeur de villages soudainement devenus paisibles ont fait le tour du Web – certaines vraies, d’autres fictives. Des coyotes ont été aperçus errant dans San Francisco ; des pumas se sont livrés à la sieste dans des rues résidentielles ; des chèvres des collines sont descendues dans le village de Llandudno, dans le nord du Pays de Galles ; et des dauphins ont nagé à proximité des routes maritimes les plus fréquentées du détroit du Bosphore, à Istanbul. (1) Simultanément, des plantes et des fleurs sauvages ont poussé dans les rues, et des parcelles d’espaces verts ont refleuri, permettant le retour des pollinisateurs comme les abeilles dans les centres urbains.(2)

 

Montréal n’a pas fait exception à cette recrudescence de la nature. Les oiseaux sauvages ont fait escale dans notre ville devenue plus calme, et nous avons pu les entendre plus distinctement. Au parc La Fontaine, j’ai repéré des carouges à épaulettes et écouté le chant du bruant à gorge blanche, un oiseau que je n’avais entendu auparavant que dans les parcs nationaux du Québec, car il ne s’approche habituellement pas des villes, trop bruyantes.

 

Ces événements m’ont fait réfléchir à l’espoir. En cette période d’incertitude quant à la survie des êtres humains sur Terre, ces histoires d’animaux et de plantes qui se frayent un chemin hors de la nature sauvage et dans nos milieux urbains m’ont fait réaliser que la vie continuait malgré notre confinement, et que même si nous devions disparaître, une nouvelle vie se développerait, modifiant les espaces construits, épanouie et florissante. J’ai ressenti de l’espoir. J’ai vu en ce moment unique de l’histoire la possibilité de façonner notre avenir immédiat. Les humains sont aussi vulnérables à la mort et à la disparition que toutes les autres espèces vivantes, c’est pourquoi nous devons mettre fin aux agressions répétées contre l’environnement. La pandémie nous a rappelé que nous aussi, nous sommes petits, que nous aussi sommes susceptibles de disparaître et que, contrairement à toute autre espèce, nous avons la capacité de changer le cours du temps. Nous représentons « la dernière génération capable de sauver la Terre d’une destruction irréversible », comme l’a conclu le rapport 2019 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations unies.

 

Sur Éco(systèmes) d’espoir

Un écosystème [ensemble formé d’une communauté d’êtres vivants, ainsi que leurs interactions les uns avec des autres, et avec leur environnement] est généré par la présence de composites développés au centre d’un dense réseau d’interdépendances et d’échanges d’énergie, d’information et de matière, permettant le développement et le maintien de la vie. Ce système, qui promeut et développe la vie, ainsi que son potentiel, marche en contingence avec tous les êtres vivants et non-vivants qui en font partie, rendant chaque élément dépendant de tous les autres, tous entrelacés, entremêlés. Pour nous, ceci est une source d’espoir, prouvant que nous tirons notre propre force des connexions existantes entre chacun, ainsi que d’un besoin profond de communauté.

 

Donc, ce sont les connexions qui maintiennent la vie et catalysent l’espoir. L’exposition Éco(systèmes) d’espoir rassemble des artistes locaux et internationaux qui s’intéressent à la période écologique actuelle et aux imaginaires créatifs du futur. Certaines œuvres explorent ces problématiques en faisant appel à l’imagination, tandis que d’autres incitent à l’action. Elles questionnent le sens de l’espoir, individuel et collectif et les les nuances entre « je » et « l’(es) autre(s) ».

 

Pour l’approche curatoriale, l’idée maîtresse est celle d’évoquer le sens de l’infiniment grand et de l’infiniment petit, pour questionner l’idée anthropocentrique qui statue que les humains sont la mesure (et le centre) de l’Univers.

 

Les œuvres réunies dans cette exposition portent un regard singulier sur l’espoir, un puissant levier de réflexion pour les concepts de relationnalité et de développement des communautés, et surtout, pour la survie de l’ensemble des espèces vivantes sur Terre.

 

Commissaire : Erandy Vergara-Vargas

Notes de fin
1. Chrobak, Ula, “The real reason we’re seeing more wildlife during the pandemic,” Popular Science, Apr 9, 2020, <https://www.popsci.com/story/environment/wildlife-in-cities-covid-shutdown/>; Weber, Leah, “Wild Animals Explore City Streets Amid Pandemic,” Discovery, April 15, 2020 <https://www.discovery.com/nature/wild-animals-explore-city-streets-amid-pandemic>; “Coronavirus: Wild animals enjoy freedom of a quieter world,” BBC, 29 April 2020, <https://www.bbc.com/news/world-52459487>.

 

2. “El resurgir de las abejas gracias al confinamiento humano,” Semana, April 20, 2020, <https://www.semana.com/medio-ambiente/articulo/coronavirus-en-colombia-el-resurgir-de-las-abejas-gracias-al-confinamiento-humano/50045/?fbclid=IwAR1SuIcJAOb8zTJkgdy1q3ydXdbqDiqKRly40rs1vyp6HeK5vmgN4W7plbw